Les visiteurs occidentaux au Zimbabwe sont habituellement surpris et frappés par le niveau artistique que les zimbabwéens considèrent comme normal. Des moindres objets usuels de village, comme un pot ou un panier tressé, se dégage une évidente sensibilité artistique et une grande attention portée aux détails. Les artistes eux-mêmes bénéficient d'une haute estime dans l'organisation sociale traditionnelle. Les centres de Harare et Bulawayo recherchent activement les meilleurs talents pour leur offrir une formation spéciale.
L'art shona a ainsi émergé d'une école, située à Tengenenge, une ferme isolée à 20km de Guruve, près des gorges du Zambèze. C'est un colon visionnaire, Tom Blomefield, qui après y avoir fait fortune s'est consacré entièrement au mécénat. En 1966, suite à la découverte d'un superbe filon de serpentine, il s'est concentré sur la sculpture. Sa ferme a alors attiré en trente ans des centaines de sculpteurs assurés d'y trouver le gîte et le couvert, des outils et de la pierre, des contacts et un lieu d'exposition. La ferme a traversé sans encombre les ravages de la guerre d'indépendance, grâce à l'esprit de tolérance mutuelle qui y régnait. Outre le mécénat extérieur, ce sont les artistes résidents qui financent la ferme. Le Musée National du Zimbabwe y a installé une antenne et procède à une sélection active et un encouragement intelligent des jeunes talents.
Contrairement à de nombreux autres arts du Zimbabwe, la sculpture shona est récente et n'a pas de fonction traditionnelle, ni de signification rituelle. Pourtant, au même titre que la musique de Thomas Mapfumo, c'est la branche artistique qui aura le plus obtenu de reconnaissance internationale, non pas comme un grand art africain mais comme du grand art au sens large. Il s'agit d'un art moderne, puisqu'il est né dans les années soixante, et marie des influences africaines avec des techniques artistiques européennes.
Son nom lui vient de la tribu Shona, dominante au Zimbabwe, qui n'a pourtant aucune exclusivité ; d'autres groupes tribaux plus réduits participent également au mouvement. Le folklore fournit la majorité des thèmes : animaux stylisés, divinités, esprits, ancêtres, totems. La représentation d'émotions profondes utilise comme support des scènes de la vie quotidienne. Un thème récurrent est la métamorphose de l'homme en animal, sanction prévue lors du viol de certaines interdictions sociales. C'est ainsi le centre de l'oeuvre de Bernard Matemera, le plus connu des artistes de Tengenenge, qui avec ses dimensions et ses formes délibérément irréelles a obtenu un prix international majeur en Inde ; une exposition géante en plein air l'a fait connnaître à Paris en 1997.
Outre Washington Chifamba, plusieurs créateurs sont reconnus parmi les principaux sculpteurs au monde. John Takawira est un maître des formes, tailles et thèmes ; Henry Munyaradzi s'est taillé des succès avec des oeuvres faciles nettement cubistes. A l'opposé, Nicholas Mukomberanwa a recherché des formes volumineuses mais avec un trait minimaliste.
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